Eds Odile Jacob, 2021, 304 pages
Ce livre est consacré aux bouleversements de l’économie mondiale au XXIème siècle. Comment l’ascension fulgurante de la Chine, met-elle en cause l’hégémonie du dollar ? Quelles en sont les conséquences pour le système monétaire international (SMI) ? Comment tenir compte de cette situation pour affronter les défis écologiques ? L’auteur étudie la rivalité géopolitique découlant de la montée en puissance de la Chine. Il présente les transformations de la monnaie en Chine et notamment la création de la monnaie digitale de banque centrale.
L’ouvrage est structuré en 4 parties : la vision de la Chine pour le SMI ; Un nouvel ordre financier pour l’urgence climatique ; la course vers la prochaine génération de monnaie ; le cadre institutionnel d’un système monétaire multi- latéral.
Les auteurs identifient que les nouvelles routes de la soie forment un vecteur d’internationalisation du Rimimbi. Mais la non convertibilité de la devise, l’utilisation « hétérodoxe » de la monnaie et surtout le moindre respect des normes financières internationales, rendent ce projet difficile à mettre en œuvre.
L’Empire du milieu par sa taille, sa population et son économie est un gigantesque terrain d’expérimentation pour les technologies numériques. Michel Aglietta réaffirme la nécessité que prévalent les monnaies digitales de banque centrale, qui seules permettent de maintenir une valeur stable (hors inflation) de la monnaie. Cette attitude pionnière de la Chine à cet égard peut lui donner un avantage majeur sur la scène internationale avec des risques de souveraineté. Le système retenu de fonctionnement de l’e-yuan, impose aux citoyens d’ouvrir un « e- compte bancaire » dans les livres de la banque centrale. Celle-ci pourra alors connaitre en temps réel les comportements d’épargne et de dépenses des utilisateurs. Ce n’est pas un problème au regard du système politique chinois, mais ce le serait si l-e-yuan et son modèle était implanté dans des « pays de mission » comme le continent africain par exemple dont tous les citoyens et les administrations auraient un compte dans les livres de la Banque populaire de Chine !.
Pour éviter ces dangers, les auteurs recommandent de transformer en monnaie les Droits de Tirage Spéciaux (DTS) chers à Michel Aglietta. Il propose d’organiser un système monétaire multi latéral qui demanderait à chaque pays majeur d’accepter d’organiser des zones monétaires régionales et d’élaborer les prémisses d’une coopération multi- latérale par la promotion du DTS dont l’émission sera exclusivement réservée au FMI.
Ainsi, conviendrait-il de financer l’urgence environnementale avec des DTS, et de créer un marché du DTS pour finir par l’émergence d’un e-DTS !
Il s’agit rien de moins que de mettre en fin au principe d’une devise-clé, passée, présente ou à venir. Un SMI sur base DTS permettrait au FMI de jouer un rôle déterminant dans la concertation macroéconomique et de devenir un prêteur en dernier ressort généralisé.
En instaurant le multilatéralisme monétaire dans sa gouvernance, son émission et son utilisation, le FMI deviendrait source de l’assurance collective indifférenciée que les statuts lui avaient conférée.
L’ouvrage est intellectuellement séduisant, mais on peut légitimement attendre le prochain livre qui donnera une méthodologie de la migration du dollar vers le DTS.
Chronique rédigée par Dominique Chesneau
