Dans son dernier livre monumental, Thomas Piketty poursuit sa réflexion sur les inégalités sociales à l’échelle mondiale, en s’efforçant de montrer, contrairement aux idées reçues, qu’elles ne sont pas naturelles mais engendrées par des « idéologies et des discours conservateurs ». Selon lui, les légitimations de ces inégalités à travers l’histoire, reposeraient sur des simulacres d’objectivation. Il dénonce notamment « l’idéologie propriétariste » fondée sur le droit de propriété hérité de la Révolution française, qui est censée garantir la stabilité des institutions et éviter un « chaos généralisé ». Il perçoit dans la propriété individuelle une « forme particulière de domination sociale ». Il formule des propositions visant à éradiquer la concentration de la richesse et à favoriser « la circulation du capital » : impôt confiscatoire sur le capital pouvant atteindre 90% des revenus ; dotation universelle d’un capital à chaque citoyen… Ouvrant ainsi une 3e voie entre le capitalisme et le collectivisme, il préconise enfin un développement de la cogestion des entreprises entre actionnaires et salariés.
Le livre précédent de Thomas Piketty (« le capital au XXIe siècle ») avait essuyé les critiques des économètres pour ses méthodes et ses sources statistiques parfois contestables. Ce dernier livre rencontre le scepticisme des économistes politiques pour son éthique scientifique parfois discutable, car l’auteur « se garde de mesurer les conséquences économiques et sociales d’un « dépassement de la propriété privée ».
L’ouvrage soulève diverses interrogations sur les raisons de son succès Adresse –t-il une provocation aux économistes néo-libéraux ? Appelle-t-il l’avènement d’un nouveau système crypto-collectiviste ? S’efforce-t- il de lancer sur les campus américains un nouveau mouvement de « french theory » ? Relève-t-il d’une nouvelle curiosité encyclopédique ?
Notes de J-J. Pluchart