« Vallée de la mort » ! C’est la première notion qui nous apparaît dans une figure trouvée au hasard intitulée : Le cycle de vie d’une start-up. C’est d’autant plus frappant que ladite « vallée » n’en finit pas de s’étendre sur une durée que l’on imagine propice à tous les dangers. Voilà peut-être une explication au fait, qu’alors qu’ils ont de l’expérience, un réseau et du capital, les cadres des grands groupes investissent peu dans les start-ups comme le montre récemment une étude de Forvis Mazars. Ce sont deux mondes différents (Le mot « risque » de capital-risque n’y est certainement pas étranger). Au-delà de cette prise de connaissance anecdotique, nous avons entre les mains un ouvrage qui ne renie pas Schumpeter et sa destruction créatrice mais introduit un certain nombre de concepts qui sont parfois bien établis (comme les externalités positives en tout genre ou spillovers) mais aussi moins connus (comme celui d’innovatisation)pour expliquer en quoi les grands programmes comme Apollo peuvent être de grands succès technologiques, mais sans innovation marquée. La différence avec SpaceX tient au fait que ce dernier est centré sur une innovation portée par un changement de valeur, un abaissement des coûts, où les opportunités commerciales explosent. Les trois parties qui composent le livre traitent tour à tour de la microéconomie de l’innovation, de l’analyse macroéconomique et historique jusqu’aux confins du XXème siècle, la dernière partie, très ambitieuse (si l’on se réfère à l’usage traditionnel de l’idée d’innovation) n’a pour autre vocation que de définir une économie capable de « contribuer aux solutions des grands problèmes sociétaux ».
Au passage, Dominique Foray, membre du Conseil suisse de la science, ne manque pas de souligner comment l’Europe aurait – selon lui – déjà perdu l’accès à l’espace, malgré un agenda Bruxellois teinté de souveraineté technologique et d’autonomie stratégique, de même que sa « dissection » du curieux animal qu’est le CNRS est particulièrement cruelle lorsque l’on compare cette noble institution au système suisse.
Dominique Foray est professeur émérite à l’École polytechnique fédérale de Lausanne et membre du Conseil suisse de la science. Ses travaux portent sur l’économie de la connaissance et l’économie et les politiques de l’innovation. Ses travaux sur la spécialisation intelligente ont fortement influencé les politiques régionales de l’Union européenne.