Bibliothèque des sciences humaines, NRF – Gallimard, 350 pages
Jacques Mistral conjugue dans son dernier livre, un récit historique et un essai de sciences humaines. Son originalité réside dans sa capacité à mêler t « l’économique », c’est à dire les forces influençant les conditions matérielles de l’ existence – la richesse – et « le politique », qui recouvrent les forces organisant l’exercice du pouvoir – la puissance .
L’auteur perçoit dans l’histoire « fascinante et paradoxale» de la formation des Etats-nations européens, à la fois des similitudes – un assemblage de capitalisme, de démocratie et d’individualisme – et des différences , notamment dans leurs modes de construction, comme par exemple, le centralisme à la française face au fédéralisme à l’allemande.
Dans ce contexte, l’auteur perçoit « ce qui rend la France d’aujourd’hui , comme celle de 1789 ou du Moyen Age, à la fois si proche et si différente de l’Angleterre, de l’ Allemagne ou de l’Espagne, aux mêmes époques». Il appuie sa démonstration sur l’actualité, rappelant que l’histoire contemporaine a montré combien la vie de la nation est rythmée par les interactions entre l’économique et le politique. Il observe par ailleurs que « le pouvoir politique comme l’activité économique sont toujours en mouvement et peuvent proposer soit des opportunités permettant de transformer les conditions du vivre ensemble, soit peuvent aussi conduire à figer la nation dans l’ immobilisme, le repli sur son territoire et ses traditions , voire dans le conflit ».
Avec cette nouvelle illustration de la pensée économique française, l’œuvre particulièrement riche de Jacques Mistral, est complétée par une contribution majeure à la compréhension de « l’exceptionnalisme de la France », et de son régime particulier d’économie politique. Mais elle sera confrontée aux mêmes défis que les autres « veilles nations », au changement climatique , au vieillissement de la population, aux défaillances des systèmes de santé, de l’éducation , de la sécurité …
Jean- Louis Chambon