Elementor #76

Perplexity Publishers : Vers un nouveau modèle économique pour les médias à l’ère de l’IA

Les acteurs de l’intelligence artificielle générative (GenAI) font face à des critiques croissantes concernant l’utilisation non autorisée de contenus médiatiques pour entraîner leurs modèles. Plutôt que de risquer des poursuites judiciaires, certains acteurs du secteur préfèrent désormais nouer des partenariats stratégiques avec les éditeurs. Après OpenAI avec SearchGPT, c’est au tour de Perplexity AI, une start-up californienne basée à San Francisco, d’annoncer des accords significatifs avec plusieurs médias de renom pour nourrir son « moteur de réponse conversationnel ». Perplexity AI : Une ambition claire Fondée en août 2022 par Aravind Srinivas, ancien chercheur chez OpenAI et DeepMind, accompagné de Denis Yarats, Johnny Ho et Andy Konwinski, Perplexity AI a lancé son produit phare, Ask, dès décembre 2022. L’objectif : proposer une alternative innovante au géant Google. Aujourd’hui, l’entreprise revendique plus de 10 millions d’utilisateurs actifs mensuels et plus d’un demi-milliard de requêtes traitées en 2023. Initialement basée sur GPT-3.5 d’OpenAI et Microsoft Bing, la plateforme a ensuite développé son propre index de recherche et ses propres modèles de langage (LLM), incluant les récents modèles PPLX basés sur Llama 2 70B et Mistral-7B. Les réponses fournies sont systématiquement sourcées, garantissant une transparence cruciale à une époque où les biais algorithmiques sont scrutés de près. Le programme Perplexity Publishers : Un partenariat gagnant-gagnant Annoncé officiellement sur le blog de Perplexity, le programme Perplexity Publishers vise à créer un écosystème durable et équilibré entre l’IA et les éditeurs de contenu. Parmi les premiers partenaires figurent des noms prestigieux tels que TIME, Der Spiegel, Fortune, Entrepreneur, The Texas Tribune et WordPress.com. L’un des piliers du programme réside dans le partage des revenus publicitaires. Perplexity prévoit d’introduire des annonces intégrées sous forme de “Questions associées”, permettant aux marques de positionner des contenus sponsorisés en lien direct avec les requêtes des utilisateurs. Les revenus générés seront ensuite redistribués aux éditeurs partenaires, bien que les détails précis de ce partage restent confidentiels pour le moment. Ces partenariats interviennent dans un contexte marqué par des accusations de plagiat émanant de plusieurs médias, dont Condé Nast et Forbes. Bien que Perplexity réfute tout lien entre ces allégations et le lancement de son programme, le PDG Aravind Srinivas insiste sur l’importance de soutenir financièrement le journalisme de qualité et de garantir une transparence totale dans les pratiques d’IA. Des avantages technologiques pour les partenaires Les partenaires du programme bénéficieront également d’un accès privilégié aux API de Perplexity, leur permettant de déployer leurs propres moteurs de réponse conversationnelle sur leurs plateformes. De plus, les employés des partenaires pourront profiter gratuitement de l’offre Enterprise Pro de Perplexity pendant un an, incluant des fonctionnalités avancées de confidentialité et de sécurité. En complément, une collaboration avec ScalePost.ai permettra d’affiner l’analyse des interactions entre les contenus éditoriaux et les réponses générées par Perplexity, renforçant ainsi la transparence et la confiance. Un avenir collaboratif entre IA et médias Le programme Perplexity Publishers marque une étape majeure dans la construction d’une relation mutuellement bénéfique entre les géants de la GenAI et les éditeurs de contenus. De nouveaux partenariats sont déjà en cours de discussion, et des initiatives innovantes, comme des abonnements groupés, pourraient voir le jour prochainement. En conclusion, comme le souligne Aravind Srinivas : “Nous avons toujours cru que nous pouvions construire un système où tout l’Internet gagne, et ce programme n’en est que la première étape.” Chronique de Jean Jacques Pluchart

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BIASONI Sami, Le statistiquement correct, Eds du Cerf, 264 pages.

La lecture du livre de Sami Biasoni s’impose en ces temps de joutes électorales dont les armes se présentent notamment sous forme de statistiques et de graphiques. L’auteur s’efforce, à l’aide d’observations scientifiques et d’études de cas célèbres, de démontrer la validité de certains aphorismes, comme la loi de Brandolini (« l’énergie nécessaire pour démonter une ineptie est deux fois supérieure à celle déployée par son auteur »), la formule de Winston Churchill (« je ne comprends que les statistiques que j’ai moi-même manipulées ») ou celle de Mark Twain (« les faits sont têtus, il est plus facile de s’arranger avec les statistiques »). Sami Biasoni reconnaît  que la statistique n’est pas réellement une science, mais est un « outil discursif », une « discipline qui requiert compétence et honnêteté », un « instrument de légitimation de l’action publique » .  Reprenant les célèbres travaux de Tversky  et Kahneman, il énumère les multiples biais, en les illustrant d’exemples convaincants, qui sont de nature à orienter les jugements étayés par des chiffres : non représentativité d’un échantillon, orientation performative d’un questionnaire, biais d’ancrage, de cadrage, de confirmation, de sélection,  de spécularité,  systématiques, introduits par l’intelligence artificielle… L’auteur dénonce le caractère spécieux des données les plus citées en matière d’écarts de salaires entre hommes et femmes, d’influences des écrans sur la violence et l’apprentissage des enfants, de statistiques basées sur les prénoms des immigrés (les dernières études montrent que les prénoms les plus courants des enfants de la 3e génération d’immigrés sont Nicolas et Yann), des surcoûts présumés de l’immigration, des contrôles faciaux dans les rues, de la fraude aux prestations sociales… Il constate que les statistiques citées dans les débats  visent de plus en plus à « faire illusion »  n’étant que des « simulacres d’objectivité ». Il attribue cette dérive au recul des mathématiques dans l’enseignement français. Il conclut l’ouvrage par des leçons méthodologiques de debunking (« défalsification » des statistiques) et de fact checking (vérification des sources). Sami Biasoni (docteur en philosophie de l’ENS) enseigne à l’ESSEC. Note de lecture rédigée par J-J.PLUCHART

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GRATALOUP Christian, Géohistoire, Eds Les arènes, 520 pages.

Dans « Géohistoire : Une autre histoire des humains sur la Terre », Christian Grataloup propose une réflexion captivante qui réunit géographie, histoire, anthropologie et bien d’autres disciplines pour retracer l’évolution des sociétés humaines en lien avec leur environnement. Ce géographe de renom réinvente la manière de comprendre l’histoire mondiale, en ancrant chaque étape de l’humanité dans son contexte géographique et climatique. À travers une approche globale, Grataloup souligne l’importance de la géographie dans la formation des civilisations, montrant que les défis environnementaux (climatiques et géologiques) ont souvent été des moteurs décisifs dans l’émergence ou le déclin des peuples. Ce récit met ainsi en lumière la dimension écologique de l’histoire humaine, explorant l’impact des ressources naturelles, du climat, et des déplacements géographiques sur la trajectoire de nos civilisations. L’ouvrage se distingue par sa richesse pluridisciplinaire. En mobilisant des connaissances en climatologie, économie, génétique et géologie, Grataloup élabore une “géohistoire” complète, capable de donner une nouvelle perspective à des événements historiques majeurs. L’idée sous-jacente est que les sociétés humaines ne peuvent être comprises qu’en prenant en compte leur espace géographique, illustrant ainsi que notre développement est intrinsèquement lié à la Terre elle-même. Pour tous ceux qui s’intéressent à l’histoire globale, cet essai se révèle être une lecture essentielle. Grataloup ne se contente pas d’analyser des faits historiques isolés, mais les place dans une trame plus vaste où l’espace et le temps se rejoignent pour mieux comprendre l’humanité. Géohistoire est un livre dense et ambitieux, conçu pour un large public, des étudiants aux spécialistes, en passant par les curieux passionnés d’histoire et de géographie. Une lecture qui fait écho aux défis contemporains en rappelant que l’histoire de l’humanité est intimement liée à celle de la planète sur laquelle elle évolue. Ce livre est un véritable coup de cœur pour ceux qui souhaitent voir l’histoire avec le prisme du temps long et plus ancré dans notre environnement géographique. Christian Grataloup est un géohistorien né le 12 avril 1951. Il fut professeur à l’université Paris 7 jusqu’en 2014, ainsi qu’à Science Po Paris. Il fut professeur à l’université Paris 7 jusqu’en 2014, ainsi qu’à Sciences Po Paris et président du conseil scientifique de l’UFR Géographie, Histoire, Sciences de la Société (GHSS). Benoit Frayer

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« Cloud et IA : une révolution stratégique pour les PME »

L’ESN Infosys, un leader mondial des services numériques et du conseil de nouvelle génération, a récemment dévoilé les résultats d’une nouvelle étude menée en collaboration avec le MIT Technology Review Insights. Intitulée “Reimagining Cloud Strategy for AI-first Enterprises“, elle dresse un état des lieux en matière de cloud et de données des entreprises alors qu’elles se préparent à lancer des projets d’IA à grande échelle. Pour ce rapport, Infosys et le MIT Technology Review Insights ont interrogé 500 dirigeants d’entreprises de différents secteurs tels que l’informatique, la fabrication, les services financiers et les biens de consommation dont le chiffre d’affaires s’élève à au moins 500 millions de dollars, sur la façon dont leurs organisations envisagent et mettent en œuvre une stratégie intégrée de cloud et d’IA. L’enquête révèle que la majorité des entreprises est encore en phase d’expérimentation et de préparation de leur infrastructure cloud pour l’IA. Elles sont d’ailleurs nombreuses à prévoir des investissements supplémentaires pour accélérer cette transformation. Les principaux résultats de l’étude : Environ 2/3 des dirigeants interrogés (67 %) estiment que leur entreprise dispose d’une infrastructure cloud “développée” ou “avancée”. Cette montée en puissance du cloud témoigne d’un engagement fort à soutenir les initiatives numériques à grande échelle. Le cloud n’est plus simplement un outil de stockage ou un moyen de réduire les coûts, mais il est désormais perçu comme un catalyseur essentiel pour la mise en œuvre de l’IA. 50% des dirigeants utilisent le cloud pour l’intégration de données à des fins d’IA, 30% pour la capacité de calcul. Mohammed Rafee Tarafdar, directeur de la technologie chez Infosys, commente :  “Aujourd’hui, nous n’en sommes qu’aux premières étapes de la réinvention de l’entreprise avec l’IA et, à mesure que nous nous dirigeons vers un état collaboratif entre l’humain et l’IA, le cloud et les données seront le catalyseur de la mise à l’échelle de l’IA. Cependant, seuls 13 % des dirigeants disposent d’une « feuille de route détaillée » sur la manière dont les investissements dans le cloud feront progresser l’adoption de l’IA au-delà des données et de la puissance de calcul. En tirant parti du cloud et en adoptant des pratiques d’IA responsables, les entreprises peuvent naviguer dans cette transformation et atteindre une croissance durable”. Cependant, cette adoption massive du cloud n’est pas encore synonyme d’une intégration totale de l’IA. L’étude révèle que seulement 8 % des entreprises ont pleinement intégré l’IA dans leurs activités, tandis que près de la moitié des dirigeants (48 %) en sont au stade de l’expérimentation. Sécurité et complexité : des obstacles majeurs : L’étude révèle également que la sécurité des données et la complexité des infrastructures sont les principaux obstacles à la mise en place de systèmes cloud prêts pour l’IA.Interrogés sur les facteurs limitant la préparation de leur organisation au cloud pour l’IA, près de la moitié des dirigeants (45 %) citent des préoccupations relatives à la sécurité, à l’utilisation éthique des données, et à la protection de la vie privée. Des investissements à la hausse : En dépit de ces défis, l’étude est optimiste quant à l’avenir. 71 % des dirigeants s’attendent à ce que les dépenses dédiées à l’infrastructure cloud pour l’IA augmentent d’au moins 25 % au cours des deux prochaines années, avec 27 % anticipant une augmentation de 50 à 100 %. Cette projection reflète une prise de conscience croissante de l’importance du cloud pour soutenir les ambitions en matière d’IA. Laurel Ruma, directrice éditoriale mondiale du MIT Technology Review Insights, affirme : “Bien que 67 % des dirigeants disposent d’infrastructures cloud avancées, seul un petit pourcentage d’entre eux ont pleinement intégré l’IA dans leurs opérations. Malgré les préoccupations concernant la sécurité et la confidentialité des données, la majorité d’entre eux prévoient d’investir massivement dans la technologie cloud pour l’IA dans les années à venir. Il est clair que l’IA basée sur le cloud est l’avenir, et les entreprises sont impatientes d’investir”. Anant Adya, vice-président exécutif et responsable de l’offre de services chez Infosys, conclut : “Parallèlement à la pertinence croissante du cloud, nous constatons également que l’attention et les ressources de plusieurs entreprises sont consacrées à la mise en œuvre de systèmes d’IA entièrement intégrés. Ils s’attendent à une croissance significative des dépenses dans ce domaine au cours des prochaines années. Alors que 71 % des dirigeants s’attendent à ce que les dépenses en infrastructure cloud pour l’IA augmentent d’au moins 25 % au cours des deux prochaines années, il est clair qu’une stratégie intégrée de cloud et d’IA sera la base de la transformation de l’IA pour les organisations à l’avenir”. Le cloud computing est devenu un levier stratégique incontournable pour les entreprises de toutes tailles. Pour les PME, en particulier, il offre des opportunités uniques d’accès à des technologies avancées, de flexibilité opérationnelle et de réduction des coûts. Alors que les grandes entreprises explorent l’intégration de l’intelligence artificielle (IA) à grande échelle, les PME doivent également réfléchir à la manière d’exploiter le cloud pour rester compétitives et innover dans un monde en constante évolution. Pour les PME, le cloud représente bien plus qu’une simple infrastructure technique. Il s’agit d’un catalyseur essentiel pour la transformation numérique, permettant d’accéder à des capacités autrefois réservées aux grandes entreprises. Cependant, pour maximiser les avantages, les PME doivent surmonter les défis liés à la sécurité des données, à la complexité des infrastructures et à l’intégration progressive de technologies comme l’IA. Une stratégie claire, intégrant le cloud et l’IA, peut ouvrir la voie à une croissance durable et à une compétitivité accrue dans l’économie numérique. Chronique Benoit Frayer

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Jean-Hervé LORENZI, Alain VILLEMEUR, Partage vertueux entre salaires et profits. Eds Economica, Novembre 2023, 111 pages.

Il est fréquemment convenu d’envisager une répartition entre revenus du travail et du capital selon des références idéologiques déterminant les pourcentages affectés aux différentes parties prenantes, mais chacun s’accorde sur l’impact de ces choix sur une croissance économique satisfaisante. Depuis la Grande Récession de 2008, alors que les profits s’envolaient généralement, le ralentissement économique ou la stagnation se sont généralisés malgré les politiques budgétaires et monétaires non conventionnelles. Comment expliquer ces situations préoccupantes ? David Ricardo a indiqué en 1817 que la répartition du revenu est un problème majeur en économie. Les successeurs, les économistes classiques du 19è siècle, se sont fourvoyés à l’évidence dans l’idée que les profits tendent à s’annuler et « en mettant en avant l’effet supposé très vertueux de la concurrence.  Mais aussi les économistes marxistes pour qui les profits sont illégitimes !  L’idée de cet ouvrage, postulant une voie médiane, est de proposer une « nouvelle théorie globale de la croissance et de la répartition » en se fondant sur « un modèle de croissance néo-ricardien »  Cette « théorie » a été annoncée dans les travaux passés des auteurs en 1995 et 2023 qui rappellent ici d’autres livres très « mathématiques » : « Global Theory of Growth and Distribution » et « Growth as a chain-reaction ». « Partage vertueux entre salaires et profits » affiche une volonté d’accessibilité avec un soin de clarté et d’usage d’un style simple. Le résultat des travaux est résumé dans la règle absolue d’un nouveau partage des revenus, 2/3 de salaires et 1/3 pour les profits afin de fonder une croissance équilibrée. L’ouvrage propose des rappels historiques périodiques expliquant la non-atteinte de croissance potentielle par un excès ou une insuffisance de distribution de la valeur vers les salaires et la vertu du compromis entre croissance, répartition et emploi. Le dernier chapitre reprend les convictions fortes des auteurs pour stabiliser une croissance suffisante, plus durable et partagée : surmonter le fardeau du changement climatique, du vieillissement et des inégalités ; priorité aux entrepreneurs plutôt qu’aux rentiers ; limiter la menace économique de la dette publique ; construire le nouveau paradigme de répartition 2/3-1/3 ; pour le bien commun, taxer d’avantage les superstars des profits ; la nouvelle répartition optimale crée des emplois.  Tous ces points illustrent que cette nouvelle répartition n’est pas l’alpha et l’oméga d’une croissance vertueuse et inclusive mais qu’elle en est une variable importante. Les auteurs conviennent enfin d’une façon honnête, que « certes, il n’est pas facile de se rapprocher de la répartition souhaitable des profits et des salaires dans les sociétés de marché où les rapports de force et le rôle des pouvoirs publics sont déterminants ». Jean-Hervé Lorenzi est aujourd’hui président du Cercle des Economistes, professeur à l’Université Paris-Dauphine, conseiller du Directoire de la Compagnie Financière Edmond de Rotschild, titulaire de la chaire « économie du vieillissement » de la Fondation du Risque.Reçu premier à l’Agrégation des Facultés de Droit et Sciences Economiques en 1975, il a toujours conjugué l’enseignement théorique (Paris XIII, Ecole Normale Supérieure), le rôle de conseiller (Ministère de l’industrie) et la responsabilité opérationnelle (Groupe Havas, CEA Industrie, Gras Savoye).Alain Villemeur , ingénieur de l’École centrale et docteur en économie, est consultant et enseignant, après une carrière de cadre dirigeant à EDF. Il a notamment publié Réenchanter le monde (Éditions du Félin, en collab.) et La Divergence économique États-Unis/Europe (Éditions Economica). Il était aussi l’un des co-auteurs de l’ouvrage collectif La Raison du plus fort. Les paradoxes de l’économie américaine (Robert Laffont). Chronique rédigée par Dominique CHESNEAU

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Vincent ORTIZ, L’ÈRE DE LA PENURIE, Éditions du Cerf, 204 pages.

« Et si le problème des énergies fossiles n’était pas leur rareté, mais leur abondance ? » En prenant l’exemple du choc pétrolier des années 70, qui a marqué un coût d’arrêt à la croissance, Vincent Ortiz explique que le choc n’est pas lié à une raréfaction réelle du pétrole mais plutôt à une entente tacite entre les pays de l’OPEP et les multinationales pétrolières pour augmenter le prix de l’or noir. Même après le choc de 1973, le prix du pétrole est resté élevé en dépit de la reprise de la production grâce à la force du pouvoir de marché, celle du cartel. La pénurie ou la raréfaction des ressources naturelles permettrait de générer des profits en augmentant les prix, Ce serait la raison pour laquelle, les multinationales pétrolières, après avoir tant décrié King Hubbert, qui prophétisait l’extinction du pétrole (« peak oil »), l’ont par la suite soutenu et se sont même appuyées sur les préoccupations écologistes naissantes, celles du Club de Rome et du rapport. Meadows : Halte à la croissance ! L’auteur est très critique vis-à-vis de cette fraction de l’écologie politique, qu’il qualifie de néomalthusienne. S’inspirant comme son nom l’indique de l’économiste britannique Thomas Malthus (célèbre pour son idée de limitation de l’accroissement de la population), l’écologie néomalthusienne interprète le phénomène de rareté et d’augmentation des prix par le prisme des ressources : c’est la fin de l’abondance, c’est la décroissance.  Dans son livre, Vincent Ortiz défend l’idée qu’il est possible de concilier une baisse la croissance et un accroissement tendanciel des profits : il faut créer artificiellement de la rareté. C’est le principe du sabotage au sens de Thorstein Veblen. Ainsi, pour qu’il y ait des profits, il faut comme précondition du manque, des besoins non comblés. Ce livre sort ainsi des sentiers battus et apporte un autre regard sur la pénurie en mettant en avant le sabotage économique de Veblen. Vincent Ortiz est chercheur en économie à l’Université de Picardie Jules-Verne. Il est également rédacteur en chef adjoint du média Le Vent Se Lève. Diplômé de Sciences Po, il est spécialiste des relations internationales et de l’histoire des idées et a consacré plusieurs reportages à l’exploitation des ressources naturelles dans l’hémisphère Sud. Il signe, à 29 ans, son premier livre. Chronique rédigée par F ANGLES

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