L’auteur jette un regard original sur l’actualité économique. Délaissant le classicisme et les voies du « consensus », qui, selon Alain Dautriat, restent celles de la « médiocrité moyenne », il choisit délibérément l’audace, « jetant un pont » entre deux disciplines habituellement séparées, la philosophie et l’économie. « Qui ose gagne », une devise que les racines gasconnes de Pascal Blanqué ne renieraient pas. Ses carnets monétaires sont le fruit d’une double réflexion : celle d’un spectateur engagé qui a vécu et commenté « la montée des euphories et l’ère des soupçons » et celle du brillant intellectuel qui pose la question de la destination même de « l’économique » à l’époque moderne. L’auteur souligne que « le régime de croissance actuelle et l’architecture du système mondial ont leur cohésion, les tensions et les déséquilibres renvoyant à leur soutenabilité. La cohérence des systèmes ne préjuge pas de leur efficacité. « Le concept de régime est le lieu où peut être pensé authentiquement l’économique ». Il reste en effet à comprendre pourquoi la pensée « technique » de l’action monétaire prime sur sa fonction de « réceptacle des modes d’être, d’équilibre du réel au naturel, de la durée à la mémoire ». Cet oubli est au cœur de la distinction de l’économique à l’époque moderne. Revenir sur « l’oubli de la philosophie en sciences économiques », c’est aussi s’attaquer frontalement à l’incrédulité, s’exposer aux incompréhensions et aux critiques, mais « risquer c’est aussi espérer convaincre ». Au fil des pages de cet ouvrage et de ceux qu’il fait paraître simultanément, Pascal Blanqué construit une œuvre prometteuse.
Chronique rédigée par J-L. CHAMBON